Agriculture durable - Une alimentation saine aux portes de la ville

De la terre à l’assiette

L’écosystème local est favorable au développement d’une agriculture péri-urbaine. L’alimentation durable réunit tous les citoyens. Sur son territoire fortement urbanisé mais aussi composé de belles surfaces cultivables, les outils réglementaires de la Métropole, récemment adoptés, protègent son foncier et ses terres. D’autres actions comme l’ouverture d’une école de formation par le chef Thierry Marx, au Grand Marché, confortent cet objectif : la relance d’une agriculture de proximité. De Blagnac à Quint-Fonsegrives, immersion dans l’agriculture des champs et des villes.


À Blagnac, huit exploitants travaillent à la ferme des Quinze Sols

Balade dans de nouvelles fermes urbaines

Producteurs actifs, acquisitions de terres agricoles, partenariats et chartes signés avec différentes communes, aides à l’installation des jeunes agriculteurs, études sur les bassins de consommation, réflexion autour de la restauration collective ou avec le Grand Marché (ex Marché-gare)… La reconquête des terres agricoles et des circuits de distribution est en cours sur le territoire de Toulouse Métropole. Objectifs : produire et consommer local. Tour d’horizon des nouvelles fermes urbaines.


Quartier Trois-Cocus, la ferme de Borde Bio cultive des légumes bio en plein Toulouse.

Qui se doute que le territoire de la Métropole compte déjà 300 hectares de terrains maraîchers, qu’on produit du vin au Domaine de Candie, et que, surtout, plusieurs exploitations sont en cours d’installation ? À commencer par la ferme des Quinze-Sols, sur la commune de Blagnac, où déjà huit exploitants travaillent sur 135 hectares de plaine maraîchère aux terrains morcelés et où le travail consiste à mutualiser les bâtiments ou l’eau pour l’irrigation. Parmi eux, Boris Moya, 46 ans, a choisi de vivre de son travail de la terre, après des études supérieures scientifiques : « Mon objectif est de nourrir le plus sainement possible les gens, tout en respectant l’environnement », confie-t-il. Il produit 15 à 30 légumes différents en bio aux côtés de son employé à temps plein et de deux saisonniers en été.

Reconversions biologiques

Pour Quentin Fauvre, 31 ans, il s’agit aussi d’une reconversion. Ancien ingénieur spécialisé dans le bâtiment à Paris, il a « eu envie d’exercer une activité qui propose de vraies solutions pour notre environnement ». Après un diplôme agricole, il s’est installé en hiver 2018. « J’achète des semences paysannes, je cueille mes légumes à maturité. Je ne fais pas de labours et j’enrichis la terre avec de la matière organique pour maintenir le sol vivant. Une à deux fois par semaine, je livre mes produits à des enseignes bio et des primeurs à Blagnac », explique-t-il. Du côté des Trois-Cocus à Toulouse, un exploitant et ses huit salariés produisent depuis plusieurs années des légumes biologiques à la ferme Borde Bio, sur 5,5 hectares en vente directe facilitée par l’accès tout proche en métro. À Salsas à Quint-Fonsegrives, dans la ferme rachetée par la Mairie en 2008, il a fallu redynamiser les sols, les prairies humides et l’irrigation, relancer le patrimoine arboré ou protéger la rare jacinthe de Rome. Sur 3,5 hectares, Nicolas Schaefens, 40 ans, relance le modèle d’une agriculture de proximité et entièrement bio : vente directe pour des restaurateurs, livraisons à vélo, animations pédagogiques pour les scolaires, relance de l’agro-foresterie. À Pin-Balma, c’est un parc naturel agricole qui est en cours d’étude. Une sorte de poumon vert de plus de 200 hectares avec visites des exploitations à la clé pour le grand public.

Le grand marché en chiffres :

  • 339 producteurs
  • 148 entreprises
  • 3 300 clients/an
  • 227 000 tonnes de marchandises transitent par cet immense ensemble de logistique et de ventes

3 questions à Maguelone Pontier


Directrice du Grand Marché de Toulouse Occitanie

« L’alimentation durable doit devenir l’ADN du Grand Marché. »

Pouvez-vous nous rappeler le rôle du Grand Marché ?
Comme à Rungis, le Grand Marché de Toulouse Occitanie est le lieu où agriculteurs et grossistes vendent des produits alimentaires aux commerces de bouche, à la restauration collective, aux restaurateurs, aux fleuristes ou à la grande distribution. Sa gestion a été concédée depuis juillet 2017 à un groupement composé de Rungis, de Poste Immo et de la Caisse d’Épargne de Midi-Pyrénées.

Quelle est votre définition de l’alimentation durable ?
Selon moi, il s’agit d’une question d’intérêt général. Le développement durable, et donc l’alimentation en général, doivent devenir l’ADN du Grand Marché. Nous devons échanger ici des produits issus essentiellement de producteurs locaux, dans une démarche qualitative qui respecte la terre, à des prix accessibles sur tous les maillons de la chaîne et en direction des publics les plus démunis pour qu’ils s’alimentent décemment.

De nouveaux dispositifs et actions à long terme sont donc mis en place ?
Je souhaite que nous soyons la vitrine des produits d’Occitanie. Pour cela, nous allons développer la formation professionnelle, construire une nouvelle zone logistique de 20 000 mètres carrés, attirer de nouveaux clients dans la restauration comme des bouchers, des charcutiers, toujours avec des acteurs locaux ou de départements limitrophes. Nous accueillons déjà trois producteurs bio et nous allons développer cette filière. Et puis, surtout, il nous faut aller plus loin sur la notoriété comme Rungis a su le faire. Nous devons faire savoir que le Grand Marché a un taux d’occupation de 96 % et qu’il veut défendre des produits de proximité, abordables et respectueux de l’environnement.

Le Chef Thierry Marx a ouvert une école de formation à Toulouse

Depuis mai 2019, l’école de formation « Cuisine mode d’emploi » a ouvert ses portes dans les locaux du Grand Marché. C’est la huitième en France, créée par le grand chef Thierry Marx.

« Nous sommes dans une boucle vertueuse », explique Dominique Viel, directeur de cette école d’un nouveau genre destinée à des publics éloignés de l’emploi pour bénéficier d’une formation courte (huit semaines), gratuite et diplômante. Installée dans les locaux du Grand Marché, elle dispose d’un cadre et d’un emplacement de choix, auprès des producteurs. La première promotion a donc pris ses quartiers, ses casseroles et ses poêles, dans des locaux jusqu’alors inoccupés de 1 200 m2, flambant neufs et tout équipés. Dans l’immense espace ouvert, ils sont une douzaine à suivre la formation commis de cuisine, qui sera suivie d’un court stage, débouchant sur un Certificat de qualification professionnelle. « Thierry Marx a bien compris que nos métiers peinent à trouver de la main d’oeuvre qualifiée, et que par ailleurs des personnes rament pour trouver du boulot ».

Formation, restauration, ambition

L’école se veut un « escalier social » pour un public en situation de précarité, éloigné de l’emploi, forcément majeur et habitant Toulouse et sa région. On y apprend à un rythme soutenu les métiers de commis de cuisine et très prochainement du service en restauration option sommellerie, ou de la boulangerie avec l’apprentissage des gestes et techniques de base du patrimoine culinaire français. Ils étaient plus de 110 à candidater pour ces 12 premières places. Les plus motivés, hommes et femmes de 20 à 55 ans, ont décroché le petit Graal. « On voit immédiatement qui va vraiment s’investir, qui a envie, qui sera discipliné. En général, 90 % des promos vont jusqu’au bout de la formation », souligne le jeune directeur. L’investissement de départ se monte à 700 000 euros soutenu par Toulouse Métropole, la région Occitanie et quelques mécènes. Et pour goûter aux plats concoctés, le restaurant d’application baptisé Court circuit est ouvert deux jours par semaine pour environ 60 couverts, et peut accueillir des groupes d’entreprises ou de particuliers. Le tout dans un espace totalement ouvert sur les plateaux techniques.

Relevez le défi des familles à alimentation positive

Toulouse Métropole, accompagnée par l’association Érables 31 (Ensemble pour Représenter l’Agriculture Biologique Locale, Écologique et Solidaire), lance le « Défi Familles à Alimentation Positive » d’octobre 2019 à mai 2020. Objectif : sensibiliser les citoyens à une alimentation locale et de qualité dans des conditions économiques accessibles. Quatre équipes d’une dizaine de foyers (personnes seules, couples, foyers avec enfants) relèveront un défi : augmenter sa consommation de produits bio locaux à budget constant et en se faisant plaisir, durant une année scolaire ! Des temps forts seront proposés durant cette expérience : visite de ferme, diététique et nutrition, cuisine, maîtrise du budget, partage d’expérience…

Plus d’infos: famillesaalimentationpositive.fr et erables31.org