Christophe Debard Innovateur solidaire
Touché par le handicap dès son plus jeune âge, Christophe Debard a décidé d’en faire une force. Ingénieur chez Airbus, il a fondé le Humanity Lab, un espace d’innovation à impact positif.
L’atelier qu’il dirige au sein d’Airbus ferait le bonheur de n’importe quel bricoleur. Fraiseuse numérique, imprimante 3D, découpe jet d’eau, poste de soudage… dans le ProtoSpace, sorte de fablab au sein duquel l’ingénieur m’accueille, il y a tout le nécessaire pour prototyper des idées innovantes proposées par des salariés d’Airbus et sélectionnées pour être testées. C’est dans ce cadre qu’est né le Humanity Lab, à l’initiative de Christophe Debard. Amputé d’une jambe à l’âge de 13 ans, à la suite d’un cancer, Christophe en a fait une force. « J’ai très tôt voulu vivre mon handicap comme une différence positive », raconte-t-il. C’est en cherchant à fabriquer une prothèse esthétique qu’il aurait de la fierté à montrer que lui est venu l’idée de mobiliser des volontaires désireux d’avoir un impact positif et les compétences techniques nécessaires pour cela. « Quel meilleur endroit qu’Airbus, où se fabriquent des avions extraordinaires, pour trouver ce genre de profils », sourit-il. En à peine six mois, une prothèse électroluminescente, « la plus cool du monde », était réalisée.
Transformer l’adversité en opportunité
« Donner vie ensemble à un projet utile sans rien attendre en retour que la joie de faire avancer les choses, mais aussi pouvoir parler sans tabou du handicap… l’expérience était tellement positive qu’il était évident qu’on n’allait pas s’arrêter là », explique l’ingénieur dont la proposition d’utiliser les ressources et les compétences disponibles au sein de l’entreprise pour formaliser la création d’un fablab dédié à l’innovation sociétale, un Humanity Lab, est rapidement acceptée par Airbus. L’initiative rencontre tout de suite un vif succès auprès des salariés qui donnent de leur temps libre et les projets solidaires se multiplient, dans le domaine du handicap mais aussi de l’environnement : « Nous avons créé une prothèse de bras pour une petite fille, une éolienne pour une école en Colombie, un pèse-bébé pour lutter contre la malnutrition, des prothèses-lames de courses en carbone… », énumère Christophe Debard, dont le Lab a aussi produit récemment des équipements pour des athlètes paralympiques. « Nous avons conçu un fauteuil entièrement réglable pour le champion de parabadminton David Toupé, une poignée qui fait gagner des centimètres d’allonge à l’escrimeur en fauteuil Maxime Valet, une coque aérodynamique pour la prothèse du cycliste Alexis Hanquinquant… » Au total, pas moins de 10 innovations-maison étaient présentes aux derniers Jeux Paralympiques en partenariat avec l’agence nationale du sport (ANS). « Donner de son temps, ça n’est en aucun cas perdre son temps », martèle l’ingénieur fier de ces réussites et des équipes de bénévoles – pas moins de 250 volontaires sur liste d’attente à ce jour – qui ne comptent pas leur énergie. « Nous n’avons pas d’attente démesurée, il ne s’agit pas de changer le monde, tempère-t-il. Pour autant, nos petits pas ont un pouvoir, celui de faire évoluer le regard sur le handicap, celui de créer des synergies, de donner du sens à l’engagement des salariés… Tout le monde sort gagnant de l’expérience ! »
L’interview de Christophe Debard sur metropole.toulouse.fr (nouvelle fenêtre)
VERBATIM
« Donner de son temps, ça n’est en aucun cas
perdre son temps »
1993
Amputation de la jambe gauche
2012
Installation à Toulouse
2018
Création du Humanity Lab