Avec l’arche Marengo, Toulouse s’ouvre à l’est
À deux pas de la gare Matabiau, la Médiathèque José-Cabanis, à la tête du réseau des 21 bibliothèques de Toulouse, surplombe le canal du Midi depuis 20 ans déjà. Telle une porte vers les quartiers Est de la ville, elle est aussi le symbole de l’évolution du quartier Marengo et de la Ville rose ces dernières décennies.
On entend souvent dire que Toulouse manque de bâtiments à l’ambition architecturale forte. Pourtant, par son allure, ses dimensions, ses matériaux et même son emplacement, l’arche Marengo, qui abrite notamment la Médiathèque José-Cabanis, est en rupture avec l’ossature de la Ville rose. Paradoxalement, elle est aussi un formidable marqueur dans l’histoire de Toulouse, véritable trait d’union entre le passé et le présent. Cet édifice de verre, de métal et de briques, ouvert en 2004, a pris la place de l’ancienne école vétérinaire de la ville, détruite 40 ans plus tôt. OEuvre de l’architecte Jean-Pierre Buffi, qui conçoit des bâtiments s’inscrivant dans leur tissu originel, il intègre en effet la brique, incontournable de l’architecture toulousaine, reproduisant la couleur des toits et façades. Par ailleurs, cette porte, bien qu’asymétrique (les deux piles sont de largeur différente), laisse ouverte la perspective reliant les allées Jean-Jaurès et la colline de Jolimont.
Deux siècles de transformation urbaine
À travers ce choix, l’arche rappelle l’histoire du lieu. Le quartier Marengo, édifié au XIXe siècle entre l’école vétérinaire et le cimetière de Terre-Cabade, inaugurée en 1835, marque à l’époque les limites de la ville. Sur le pont qui enjambe le canal du Midi, tout près, des barrières permettent de contrôler l’entrée des marchandises. Mais le développement de Toulouse, avec un afflux toujours plus grand de population, rend nécessaire l’extension urbaine et la création de nouveaux quartiers, comme celui de Jolimont, au mitan du XXe siècle. C’est dans ce contexte que l’école vétérinaire est détruite à partir de 1964, marquant l’ouverture de la ville vers l’Est. Aux grandes heures de l’automobile, de nouvelles voies de circulation sont créées, comme l’avenue Georges-Pompidou ou la rocade toulousaine, inaugurée en 1988. Devenue une véritable porte d’entrée, la zone se dote d’un grand parking de délestage, aménagement que l’on peine à imaginer aujourd’hui. L’arrivée du métro, en 1993, avec la station Marengo-SNCF, marque un tournant dans l’évolution du quartier et un projet d'aménagement urbain est alors imaginé. De là naîtra le bâtiment qui s’y dresse depuis 20 ans, imposant et ouvert, barrière et porte, comme un clin d’oeil à l’histoire du lieu. Aujourd'hui, le quartier poursuit sa transformation avec le projet urbain Grand Matabiau - Quais d'Oc et la future ligne C du métro.
Mais pourquoi Marengo ?
Cette mention viendrait du boulevard Marengo créé au XXe siècle, venant remplacer une ancienne place Marengo selon l'urbaniste Jean Coppolani. Dans le quartier, de nombreuses rues faisaient référence à des batailles ou des généraux napoléoniens, en souvenir de la Bataille de Toulouse qui s'est déroulée à cet emplacement le 10 avril 1814.
Bibliographie : Marcel Thourel, Vivre à Marengo, La vie d'un faubourg populaire de Toulouse entre les deux guerres, Éditions Privat ; Toulouse Passions, Numéro Spécial Médiathèque José Cabanis, Bibliothèque de Toulouse Direction : L'agence evelyne ; Texte : Paul Périé ; Illustrations : Célia Gazal ; Merci à la Direction du Patrimoine.
" Bien que [la médiathèque] soit monumentale, elle n'est pas écrasante. "
Jean-Pierre Buffi, Jacques Hurtevent, architectes
Des fonctions multiples
Depuis les allées Jean-Jaurès, la partie droite du bâtiment est occupée par la Médiathèque José-Cabanis sur près de 13 500 m2. Dans l’autre aile, reliée à la médiathèque par les espaces de réception au sommet qui offrent un panorama sur la ville et répondent à la place Wilson, on trouve notamment des bureaux de Toulouse Métropole, et, depuis 2022, la Maison de L'Énergie.
Avec quels matériaux ont été réalisés les pare-soleil ?
En véritable terre cuite! En plus d'une régulation thermique, ce matériau contribue à l'intimité des lieux en atténuant la luminosité directe.
Années 70 - fin des années 90
Dès les années 70, le quartier désormais entièrement ouvert, possède un axe routier important menant sans détour au centre-ville. La zone devient un carrefour d'échanges urbains avec les trains, la gare routière ainsi que le métro.
1834 - 1964 (Démolition)
L'ancienne école vétérinaire, et le pont Riquet (construit en 1845 juste après le redressement du canal du Midi) constituaient au cours du XIXe siècle un poste d'octroi, frontière physique entre la ville, ses faubourgs et la campagne ! La statue du créateur du canal du Midi, Pierre-Paul Riquet, tournant le dos à tous les remaniements de Marengo et à son oeuvre, reste le repère visuel toujours en place aujourd'hui, en haut des allées Jean-Jaurès.