Derrière la maison aux singes, la fabrique Giscard

Aujourd'hui nouveau lieu culturel municipal situé avenue de la Colonne, sur les hauteurs du quartier Terre-Cabade, la fabrique Giscard fut au milieu du XIXe siècle l’une des plus grandes manufactures françaises de terre cuite.

Difficile de rester insensible à la profusion et à l’opulence des décors en terre cuite qui ornent le faîte et les façades de la Maison aux singes derrière laquelle se nichent les ateliers de la fabrique Giscard. Cigare entre les doigts et haut de forme crânement posé sur la tête, l’un des singes qui ornent les angles de la toiture et qui ont donné son surnom au bâtiment, semble nous faire un clin d’oeil. Créée en 1855, la fabrique Giscard s’est fait pendant 150 ans une spécialité de l’ornement moulé en terre cuite destiné aux décors architecturaux et à l’ameublement des églises. Ses locaux, rénovés par la Mairie, illustrent, telle une vitrine grandeur nature, ce qui fit son succès.

L’engouement pour la terre cuite

À Toulouse, les ornements en terre cuite connaissent un véritable engouement au XIXe siècle grâce notamment à l’apparition de techniques de moulage qui permettent de semi-industrialiser la production et donc de baisser les coûts. Les maisons bourgeoises comme les demeures les plus modestes s’ornent d’antéfixes*, d’oculi**… Pour répondre à la demande, de nombreuses fabriques se créent. Les plus fameuses sont sans doute celles des familles Virebent et Giscard, dont les histoires s’entremêlent. Avant de créer la fabrique familiale, Jean-Baptiste Giscard est en effet contremaître au sein de la manufacture Virebent. Henri, son petit-fils, épousera par la suite la petite-fille de Gaston Virebent. Un lien familial et professionnel que Joseph Giscard, dernier de la lignée, prolongera en 1968 en récupérant une partie des moules de l’ancien atelier Virebent, alors condamné à la ruine…

Saurez-vous retrouver sur la façade les outils des artisans sculpteurs ?

  • Le maillet, le ciseau, les rifloirs, le compas de modelage.
  • La règle, l'équerre, le compas, et le rouleau de terre.

Les fours

La cuisson durait deux jours, la température pouvant monter jusqu'à 1100°C. Il fallait ensuite 4 à 5 jours de refroidissement.

La cour

C'est à cet endroit qu'était stockée et travaillée la terre : ici, broyeur et délayeur lui donnaient bonne consistance. Le mélange ainsi obtenu était mis à l'abri, à "la masse" à humidité constante.

La “chapelle”, pièce mémoire de la fabrique, abritait plusieurs centaines de moules, décors et statues.

Le grand

C'était le véritable coeur de la fabrique où prenaient vie les créations, des premières esquisses jusqu’aux dernières retouches. La principale technique employée était celle du moulage et de l'estampage.

Atelier

La terre crue était pressée au fond du moule en plâtre. En séchant elle se rétractait, rendant le démoulage plus facile.

La fabrique Giscard et l’ornement religieux

Mais n’allons pas trop vite. Car c’est dans les années 1920 que la fabrique Giscard connaît son âge d’or en se spécialisant dans l'ameublement d'églises. À cette époque, les décors architecturaux en terre cuite passent de mode tandis que les églises multiplient les commandes de décors religieux. Au catalogue de la fabrique : autels, chaires à prêcher, bénitiers, mais aussi statues et reliefs se multiplient. Elle compte alors pas moins de 300 modèles de saints à son actif ! En 1925, elle devient le dépositaire officiel des statues de Sainte-Thérèse de l’Enfant-Jésus et élargit dans le même temps son répertoire aux monuments aux morts. En 150 ans, ce sont plusieurs milliers de décors, ornements et statues qui ont été produits. Au plus fort de son activité en 1925, la fabrique Giscard emploie jusqu’à 50 salariés. Ils ne sont plus que 5 dans les années 1960. En 2005, à sa mort, Joseph Giscard était seul à travailler au sein de l’entreprise familiale.

La Maison aux singes Bâtiments légués à la Mairie de Toulouse

Les dates clés

  • 1975 et 1998 : Inscription aux Monuments Historiques d'une partie des bâtiments de la fabrique, dont la célèbre Maison aux singes.
  • 2005 : Legs à la Mairie par Joseph Giscard.
  • 2013 : Exposition au musée Paul-Dupuy sur la dynastie Giscard.
  • 2023 : Installation d'ateliers de terre cuite et de céramique par la Mairie de Toulouse.

Direction : L'Agence ; Texte : Marie Grivot ; Illustrations : Célia Gazal ; Sources : Direction du Patrimoine.
Pour aller plus loin : découvrez le livret "Explorateur : les ornements à la Loupe" à retrouver à l'Espace Patrimoine.
Merci à la Direction du Patrimoine.